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Philippe Thomassin

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Banderole aérienne, été 2018
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Banderole aérienne, été 2018Les Sables d'Olonne

Voler en éclats

D’avance, merci de l’attention que vous voudrez bien porter à ce texte.

Après des études Agricoles et d’Histoire de l’Art, l’Aéroclub a été son École des Beaux-Arts. De sa pratique de l’aviation 15 années durant en tant que pilote et artiste, ou artiste et pilote, se sont dessinnées des lignes de pensées aériennes, des lignes de travaux aériens humbles et ambitieux. Suite à ces trois cursus, Agriculture, Histoire de l’Art, Aviation, le vol réel est défini en tant que Art, et le ciel en tant que lieu d’art et d’essai.

L’altitude lui distille alors une révélation inattendue et déstabilisante artistiquement  : l’espace est inexposable. Quelques temps plus tard, au fil de ses vols, cette révélation s’avèrera libératoire.

LE CIEL …, LIEU D’ART …, ET D’ESSAI

Le vol en tant que oeuvre réalisée en ce lieu d’art et d’essai qu’est le ciel, augure la volonté d’ouvrir une voie artistique aérienne pour construire un rapport exaltant au monde sans rien vraiment fabriquer. Un travail et un rituel en résonances avec une éthique située simultanément dans et au-dessus des tourbillons de notre monde.

Le ciel ce lieu d’art et d’essai ne veut pas dire qu’il est l’objet d’une conquête spatiale. Pas de conquête ni de recherche au programme. Philippe Thomassin ne prétend pas faire de la « recherche » artistique, et ne souhaite pas en faire. Il est de la veine des explorateurs. Un explorateur qui à chaque envol n’est pas sûr de revenir vivant. Toujours la magie de l’exploration l’emportera. Pour voler il faut être cartésien, se sentir bien dans ce genre de pensée, juste le temps qu’il faut, puis s’en dégager. Et commence l’exploration.

TOUS LES JOURS, OU PRESQUE, … PHOTOGRAPHIER L’ÉTHER

Qu’il soit nuageux ou serein, sombre ou lumineux, etc., presque tous les jours, ausitôt levé, Philippe Thomassin photographie le ciel, puis l’examine, le photographiant à nouveau avant le crépuscule, tel qu’il s’expose à nous, triste ou joyeux, toujours beau. Le ciel seul, cette matière intouchable et magique en éternelle évolution, faisant de nous de perpétuels prévisionnistes, parfois jusqu’à l’absurde, voulant connaître seulement au-dessus de nos têtes, l’état du ciel à court terme. Depuis plus de dix ans, plusieurs fois par jour, où qu’il soit, Philippe Thomassin photographie l’éther sans jamais être saoûl, amalgamant consciemment passé présent et futur tel un climatologue. Il est un explorateur ailé, peintre, photogaphe, vidéaste.  Re Voir le ciel vu de la Terre.  Re Voir le ciel vu du ciel.  Re Peindre & Re Photographier les cieux vus du ciel.  Du ciel, Re Voir notre humanité.

L’ENVOL

L’envol et le vol, cette oeuvre elliptique aux multiples centres, cette transe-gression  au regard contemplatif, ludique, critique, rêveur, constructeur et poétique  en quête d’une nouvelle fécondité artistique placée sur orbite terrestre et rétinienne, serait, sans être de la famille des performances, un processus initiatique nous reliant les uns aux autres, un immense et intime rituel réactualisé, sur lequel un jour une anthropologie cosmogonique pourrait se pencher. Voler dans le ciel glacial et pauvre en oxygène, instruit une fraternelle éthique.

L’AIR DE RIEN …, LE HUBLOT DE L’AVION …, FENÊTRE D’UNE RENAISSANCE

Voler à 300 mètres, à 10 000 mètres d’altitude, ou plus haut encore, ne signifie pas posséder, domestiquer le ciel, dominer le Monde (les hommes, nos frères), ou l’Univers. Nous ne dominons rien, ne possédons rien. Nous n’exposons rien, ni l’espace, ni le cosmos, sinon notre condition humaine. C’est la paléolumière qui nous expose, c’est le paléotemps qui rythme nos vies.

L’ÉTAT DES CIEUX

La qualité de l’air est aujourd’hui menacée. Le ciel est une poubelle. Le ciel que le citadin des hypermétropoles ne regarde plus dans la journée sauf le soir à la télé pour avoir des infos sur la météo du lendemain, ou du week-end, est devenu une poubelle. Tout autour de la Terre, le ciel est devenu une déchetterie, où petits et très grands de notre monde industriel se délestent quotidiennement de leurs déchets gazeux toxiques sans se poser de questions quant à l’avenir de ce lieu non habité sauf par les oiseaux. Ce lieu vide, ce rien, perçu aujourd’hui comme un non lieu où pourtant toutes les mythologies et tous les dieux ou demi-dieux sont nés. Mais ils sont morts. Un anti-lieu où tout est permis. L’air, l’oxygène, patrimoine universel. Il est urgent que l’Homme du troisième millénaire le reconnaisse. Avant que la troposhère où nous vivons tous, dont l’épaisseur varie de 9 à 18 km d’altitude (finalement ce n’est pas si immense),  ne devienne un irrécupérable cloaque, commençons par protéger juridiquement l’oxygène planétaire. Au-delà d’une sacralisation du ciel perdue à jamais dans notre société industrielle, donnons au ciel des droits inviolables, et pérennisons cette législation planétaire afin que nos déchets gazeux toxiques ne soient plus jetés dans les hauteurs du ciel, comme les pétroliers nettoient de nuit leurs cuves en haute mer. Tout être vivant sur la planète Terre, appartenant au règne animal comme au règne végétal, est désormais menacé. Nos déchets gazeux toxiques lâchement lachés dans l’atmosphère, sont comme les pernicieux perturbateurs endocriniens, déstabilisant lentement et sournoisement, l’extraordinaire et fragile chimie du ciel. La preuve de cette menace est là.  Dèjà aujourd’hui, en Europe, en Asie, sur tous les continents, via les smartphones, dans toutes les mégapoles les citadins sont informés du degré de pollution (de respirabilité) de l’air. Irrespirabilité = Irresponsabilité. Cet air à la beauté irréelle (au fait, ce n’est pas un hasard si certains lieux sont nommés Bel Air), et cet oxygène réel, sont le dénominateur commun de tout ce qui est vivant, pas seulement des 7,5 milliards d’humains. Cet air, chaud et glacial, inspiré expiré à chaque instant par le monde animal et végétal tout au long de sa vie, est depuis la nuit des temps, le fruit d’une extraordinaire et continuelle évolution dont nous sommes désormais coresponsables quant à son devenir. Cet air/oxygène nourricier au même titre que l’eau, cet air protecteur de l’humanité, bouclier des dangers venant des profondeurs de l’Univers (astéroïdes et rayons solaires radio-actifs par exemple), cet air, nous caressant délicatement ou violemment avec ses cyclones, s’offre à nous tous, à chacun de nous, sans ségrégation, de notre premier souffle après l’accouchement à notre dernier souffle. Sans jamais s’interrompre, sans distinction sociétale, sans distincion religieuse, sans distinction d’espèce, avec une infinie frat-air-nité. L’air, l’exemple des exemples.

DE L’ATTITUDE …, A … L’ALTITUDE

Monter à 5000 m d’altitude, ou plus, bien inspirer, et s’inspirer des songes de l’altitude. Dans les avions, petits et grands, planeurs inclus, principalement sur la ligne aérienne Nantes-Nice, (diagonale nord-ouest sud-est, la diagonale du fou), et d’autres, Nantes-Ailleurs. Ni fuite, ni angélisme. Voler avec l’alliance du ciel, au-delà des obsolètes nationalismes et internationalismes tectoniques, est constitutif d’un autre souffle, mixant local et global en une planétaire artitude anthropocène.

Temps de vol, temps de flottement céleste qui est celui de Philippe Thomassin, soit sa pratique artistique du monde par le voyage aérien, il est de ces gens du voyage, gens du voyage aérien.

LE TEMPS, …

Le temps, local & universel, matière et/ou anti-matière, fiction et/ou réalité, immense question à laquelle Philippe Thomassin ne sait répondre, sinon artistiquement. Quelles que soient les réponses philosophiques et scientifiquement crédibles à ce jour, auxquelles il s’intéresse, pour  Philippe Thomassin, aussi paradoxal que cela puisse paraître, il y a dans la plasticité du temps un anachronisme culturel salvateur. Du vécu de ses vols et de ses photographies du ciel, se révèle à lui une insaisisable et cependant réelle anti-matière artistique aéro-spatiale anachronique, à matérialiser, à peindre.

L’INSAISISABLE

Force est de constater que le voyage aérien bien réel (non rêvé, non virtuel), consciemment vécu en tant que art, s’est invité dans sa vie d’artiste. Force est de constater encore une fois que dans le prolongement de ce vol réel, sans se soucier de Philippe Thomassin le moins du monde, le temps Local & le temps Universel se sont fondus avec le  temps biologique non pérenne de son corps propre. Sans se préoccuper d’authenticité, d’individualité, d’espace d’exposition, d’échelle des valeurs, de  format, l’insaisisabble temps de l’art, s’est plastiquement, élastiquement, picturalement, factuellement peint.

PEINDRE

Au retour de chaque vol, les objets sont sortis de l’avion, et leurs nouveaux temps de vol respectifs notés. Sur quelques objets choisis on ne sait pourquoi, dans un rituel qui lui appartient, de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, Philippe Thomassin peint alors sur chaque objet choisi le temps de vol qui lui est propre, son temps de flottement artistique, son anachronisme, le tout accompagné d’ornements. Par ce rituel, ce geste pictural hybride, sol-air, sans technicité, voilà cet objet transformé en : Météo-Rite.

MÉTÉO – RITE

Présentation de son travail sur internet. Sont à l’écran une vingtaine de triptyques.  Chaque triptyque associe 1 : la photo d’un objet sur lequel a été peint son temps de vol. 2 : juste quelques mots (aphorisme, bref poème, citation). 3 : une vidéo réalisée en vol. Exigeant en simplicité, cet ensemble à trois pales : photo, texte, vidéo, est alors envoyé par e-mails à une centaine de destinataires. Indépendants des lieux de l’art, ces envois mensuels, bi ou trimensuels nomméssymboliquement Météo-Rites, (en provenance du ciel et sans dangerosité à l’atterrissage sur les écrans), n’en sont pas moins des documents artistiques.

Existent aussi des projets en intérieur, en extérieur ou aériens, nécessitant des moyens importants ou particuliers dont la présentation n’est pas évidente dans ce site : L’oeil du cyclone,… Terre battue,… Yago galerie aérienne,… La voie lactée,… L’aile est en nous, … La réalisation de banderoles aériennes, …

Toutes les tentatives de définition et de théorisation de Flight Time sont les bienvenues, sachant qu’elles voleront toutes en éclats (celle ci-dessus la première), éclats tous plus brillants et brillantissimes les uns que les autres, tous solidaires.

 

Phil Masintosh 

Exposition maison rouge

14 rue de la Fosse
44000 Nantes

phil.masintosh@yahoo.fr