Interview réalisée par Marie Debat à l'occasion de la sortie de
Ecostream*, le nouveau livre de
Guillaume Janot (éd. Filigranes).
Marie Debat est chargée des expositions à la Fondation d'entreprise Ricard
En savoir plus sur le livre Ecostream
Découvrir le site de Guillaume Janot
Image : Sans titre, Beijing, hiver 2007-2009 (58 x 83 cm).
ECOSTREAM
Marie Debat : Au premier regard, tes images nous semblent familières, pourtant, très vite, le doute s'installe : où sommes-nous ? De quoi s'agit-il ? Est-ce bien réel ? Que cherches-tu à provoquer chez le spectateur ?
Guillaume Janot : Mes derniers travaux, regroupés autour de l'appellation générique
Ecostream, se déploient sous forme d'un ensemble de photo...
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Interview réalisée par Marie Debat à l'occasion de la sortie de Ecostream*, le nouveau livre de Guillaume Janot (éd. Filigranes).
Marie Debat est chargée des expositions à la Fondation d'entreprise Ricard
En savoir plus sur le livre Ecostream
Découvrir le site de Guillaume Janot
Image : Sans titre, Beijing, hiver 2007-2009 (58 x 83 cm).
ECOSTREAM
Marie Debat : Au premier regard, tes images nous semblent familières, pourtant, très vite, le doute s'installe : où sommes-nous ? De quoi s'agit-il ? Est-ce bien réel ? Que cherches-tu à provoquer chez le spectateur ?
Guillaume Janot : Mes derniers travaux, regroupés autour de l'appellation générique Ecostream, se déploient sous forme d'un ensemble de photographies réalisées essentiellement en Asie, en Europe et en Australie. C'est un parcours à travers l'univers factice de parcs d'attractions, d'environnements ou de biotopes déplacés. On y reconnaît la tour Eiffel, une campagne fleurie, tout un ensemble de repères géographiques ou culturels très familiers au premier regard.
Tout ça est donc bien réel, sans trucage. Par contre rien est vrai dans la mesure ou rien ne se trouve à sa place : la tour Eiffel que j'ai photographiée se trouve en Chine, la jungle tropicale au jardin botanique de Sydney.
Ce qui m'intéresse, au-delà du voyage géographique, c'est de questionner la représentation, la puissance des signes et des clichés. L'image organise les signes que l'on identifie, jusqu'au moment où le doute s'installe. C'est ce doute, ce moment de suspension, que je recherche.
M.D. : Quel photographe es-tu ? Celui qui construit les images ou celui qui les chasses ?
G.J. : Un peu les deux, bien que ces dernières années mon travail s'est beaucoup orienté vers le paysage, donc à priori j'aurais tendance à dire des photos que je « chasse » comme tu les définit toi-même, alors que mes travaux plus anciens, autour du portrait étaient beaucoup plus volontiers mis en scène.
Quoi qu'il en soit, il me semble que l'autorité du cadrage photographique implique, de fait, la notion de construction.
En définitive, tout mon travail récent où je cherche à développer une réflexion sur le factice, sur la faculté de l'image à mettre en doute notre perception des choses repose en très grande part sur cette question du cadrage. Les grands paysages de jungle tropicale ne sont que de petites parcelles de jardin botanique. Le cadrage permet d'isoler du contexte et ainsi de questionner l'espace, l'échelle des choses.
M.D. : Comment s'opère ton choix entre les images que tu encadres et celles que tu montre sous la forme d'une frise murale, telle que tu l'as présentée dans Ecostream à la Fondation Ricard ?
G.J. : Les images murales sont de grandes photographies de paysages, des images d'une nature qui semble intacte et préservée. Là encore il s'agit de micro-territoires, complètement fabriqués par l'homme et voués aux loisirs, photographiés à Disneyland ou dans des parcs publics.
La forme de l'accrochage dans l'exposition à la fondation, mais aussi au FRAC des pays de la Loire, est construite sur le mode du all over, avec des images collées au mur, qui se touchent et prennent tout ou partie de l'architecture de l'espace d'exposition. J'ai bien sûr cherché à créer une dimension immersive de par le format, mais c'est aussi la question du flux et du télescopage qui m'intéressait. A la fondation Ricard, l'installation est composée de 7 images qui se déploient sur près de 30 mètres de longueur. Il n'y a aucun espace entre elles, elles se succèdent, se bousculent presque en se neutralisant. Bien que je ne recadrent pas mes images, l'effet produit est celui d'un ensemble de fragments qui ici renforce cette idée de l'image comme d'un territoire en soi, autonome.
A l'inverse, dans l'exposition World Park, qui vient de se terminer à la galerie Alain Gutharc, le paysage mural fonctionne seul, respire, entouré dans l'exposition de pièces au format plus petit. C'est donc aussi un choix qui peut varier selon l'espace où les oeuvres sont présentées.
* Ecostream fait suite à une série d'expostions : Ecostream, à la fondation d'entreprise Ricard (18 novembre / 19 décembre 2009 ) Enjoy the mountains with a spanish atmosphere au Frac des Pays de la Loire (15 janvier / 7 mars 2010) et à World park à la galerie Alain Gutharc (13 mars / 13 avril 2010).